Si chacun d'entre nous connaît la
vie des Habert de Montmor, il n'en est pas de même avec
leurs successeurs, qui restèrent de 1737 à 1805, les
seigneurs de notre village.
Quelle était donc cette famille ?
Les Selle, puisque tel est leur
nom, originaire de Liège vinrent s'installer en Lorraine
avec Nicolas de Selle dès 1470. C'est avec Charles né
le 16 mars 1707 à Rouen que la famille de Selle
s'implanta dans notre commune. Charles dont les armes familiales
sont "d'argent à trois bandes
de gueules, au chef d'azur chargé de trois étoiles d'or",
occupera plusieurs charges importantes dont celles
d'avocat au Parlement de Paris [30 juin 1730], de
conseiller du roi puis Commissaire aux Requêtes du
Palais [28 avril 1739]. Il épousa en première noce à
Paris le 27 avril 1735, Catherine Gaultier de Besigny.
Elle décéda, sans doute d'une fièvre puerpérale, le
22 mai 1736, deux jours après la naissance de leur fille
Anne-Gabrielle dont nous reparlerons un peu plus loin.
C'est avec Marie-Catherine Lamouroux [1713-1766] qu'il se
remaria le 19 février 1737.
La même année le 15 septembre,
le château devint donc, la propriété de la famille de
Selle qui demeurait alors rue Sainte-Apoline à Paris. A
cette acquisition, ajoutons celle d'une pièce de 93
arpents de bois au Bois de Maincourt et celle du fief de
Fort-Manoir [18 octobre 1739].
Charles de Selle manifestera sa
générosité envers la commune à plusieurs reprises.
En 1747 il finança les travaux de restauration
intérieure de notre église, et le 8 décembre on
célébra pour la première fois la messe sur le nouvel
autel et l'on découvrit les lambris du sanctuaire, le
tabernacle, la gloire et les pilastres. A cette occasion,
Charles fit don à la paroisse, du tableau représentant
"Le Martyre de Saint-Denis", réalisé par Jean-Simon
Berthélemy, un élève de Carle Van Loo et que nous
pouvons admirer en entrant à gauche de l'autel. Madame
de Selle, participera quant à elle au rétablissement de
l'autel de la Sainte-Vierge dont elle offrit le devant.
Notre châtelain assurera en 1763
la dépense de 138 toises de pavés qui allèrent servir
à mettre en viabilité la rue qui "commence
au coin du potager du château et qui se termine devant
la croix du carrefour de ce lieu"
(Rues H. Husson et R.Berrurier jusqu'à hauteur de la rue
de Versailles).
Le 30 janvier 1769, il déposa le
château dans la corbeille de mariage de son fils
Charles-François [1749-1814], lors de son union avec Anne-Thérèse Faudran de Taillades (sa cousine issue de
Germaine) [1753-?].
Ces armes "d'Azur à une pointe
d'or". La bénédiction
nuptiale eut lieu le 1er février suivant en l'église
Saint-Roch à Paris. Dix enfants en partie natifs du
Mesnil furent issus de cette alliance.
Charles-François, lui aussi
conseiller au Parlement de Paris, fit du domaine du
Mesnil son domicile effectif jusqu'en mai 1782, date à
laquelle il en vendit l'usufruit à son cousin
Henri-François Lamouroux, écuyer puis receveur général
des finances.
Nous voici au lendemain de prise
de la Bastille et conformément au Décret de décembre
1789, la Garde Nationale remplace l'ancienne milice
bourgeoise. Lors de sa constitution au Mesnil le 1er
août 1790, Henri François Lamouroux se verra confier le poste de
Commandant. Il fallait pour la Garde Nationale un nouveau
drapeau tricolore : Henri-François, l'offrit. Il portait
sur les deux côtés, l'inscription en lettre d'or :
"Menil St Denis".
Le 26 août 1790, il rétrocéda le domaine du Mesnil à
Charles-François de Selle, qui retrouvera ainsi, après
une absence de huit années, son château et ses terres.
Charles-François jouera lui aussi son rôle dans la vie
communale. Il sera élu commandant en chef de la
Garde Nationale le 23 juin 1791 en remplacement de Henri François Lamouroux, démissionnaire.
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La tourmente de la Révolution
apaisée, il choisit de vendre le 3 nivôse de l'An IV
son domaine.
A Jean-Pierre Prengrueber, de
Cologne, il vendit les fermes de Beaurain et de Rodon, et
à sa propre demi-soeur Anne-Gabrielle-Catherine de
Selle, veuve d'Yves Verduc de Soisy, le surplus de la
terre du Mesnil avec "les
meubles meublant et mobilier garnissant la maison
d'habitation". Six années
plus tard, elle le revendit à Etienne-Dominique-Pierre
Cureau de Roullée.
Ainsi s'achève le règne d'une
grande famille qui occupa sous le règne du "Bien
Aimé" et de Louis XVI une place que l'on peut
qualifier de considérable. Désormais inscrits dans
notre mémoire, tous ces personnages, qu'à loisir vous
pourrez retrouver en parcourant les registres
d'état-civil, peuvent maintenant en toute tranquillité
retourner à leur éternité. |