Derrière un nom... un grand homme
     
     
Raymond Berrurier
     
     
     

     
Parmi les hommes ayant lutté pour l'instauration d'un équilibre entre le mode de vie rural et le mode de vie urbain, il en est un qui par ses combats, mérite tout particulièrement notre attention : Raymond Berrurier.

Raymond Berrurier naquit à Saint-Cyr-l'école le 27 juin 1899. Dès son enfance, il puisa les bases même de ses activités futures : de son grand-père, maire de Saint-Cyr-l'école, il hérita du goût des choses publiques et le dévouement à la collectivité ; de ses descendants maternels, agriculteurs dans la vallée de Chevreuse, un amour passionné de la nature.
Après de brillantes études, Raymond Berrurier obtint un brevet de notaire. Sa vie fut dès lors, singulièrement remplie.

     
L'année 1930 marqua la récompense de ses efforts, car c'est en effet en cette année, alors âgé de 30 ans, qu'il prit la charge de notaire au Mesnil-Saint-Denis.
De part cette profession, Raymond Berrurier était infiniment lié aux problèmes de sa nouvelle cité.
Il entrevit déjà le développement futur de son village pour en faire un havre de paix et de repos noyé dans la verdure.
Pour mener à bien cette tâche, il entra en 1935, au Conseil Municipal, présidé alors par Adolphe Moiton.

Trois ans plus tard, le 1er mai 1938, il fut élu maire. Dorénavant il oeuvra sans compter pour que sa commune devienne une "commune-pilote de France", jeune, gaie, propre, en un mot une cité vivante à l'échelle humaine.

 
     

Tout d'abord il voulut une Maison des Jeunes pour offrir des loisirs. C'est ainsi que fut édifiée en 1942 une des toutes premières Maisons des Jeunes et de la Culture : "La Maison rurale de la Jeunesse", inaugurée par Paul Demange, Préfet de Seine-et-Oise.

Il fonda dans le même esprit l'Association de la Jeunesse Sportive.

Son action en faveur de la jeunesse, lui valu d'être nommé Vice-Président de la Fédération Française des Maisons des Jeunes et de la Culture et parmi tous ses titres si élogieux, c'est à celui-ci que Raymond Berrurier tenait tout particulièrement.
 
     
Il connaissait personnellement les jeunes de chaque famille. Il estimait, à juste titre, que pour les maintenir dans une commune rurale si fortement soumise à l'attraction urbaine, il fallait leur donner les moyens d'exercer localement des activités culturelles et sportives de qualité.
     
En 1946, il entre au Bureau de l'Association des Maires de France avec le titre de Secrétaire Général Adjoint.
Tout de suite, il vit grand pour cette association. Il voulait qu'elle prenne son plein développement, qu'elle rayonnât dans tout le pays, s'organisât, se renforçât. Il en sera nommé le Vice-Président en 1964.
     

En octobre 1951, Raymond Berrurier se rendit très vite compte que les problèmes communaux étaient liés à des problèmes plus généraux. Aussi se lança-t-il alors à corps perdu dans le Conseil Général.

Elu à cette date, il défendra avec une farouche indépendance, l'avenir de la Région Parisienne. Il ne voulait pas que cette région qui l'avait vu naître et qu'il aimait d'une infinie tendresse, devienne une forêt de béton
"démesurée et sans âme".

Lors du débat du 20 janvier 1960, Raymond Berrurier prononçait ce réquisitoire : « Les grands ensembles auront beau vieillir, ils ne se bonifieront pas... Ils pourriront debout et nous vaudront à nous ou à nos successeurs les drames que nous connaissons aujourd'hui avec les lotissements défectueux »

     
Sa spontanéité, sa bonté lui valurent la considération et la sympathie unanime de ses collègues qui en firent à plusieurs reprises leur Vice-Président Européen d'esprit et de coeur, Raymond Berrurier comprit qu'un des facteurs puissants de l'édification de l'Europe, était l'entente par la base.

Ainsi fonda-t-il alors le
Conseil des Communes d'Europe, dont il devint le Secrétaire Général de la Section Française.
     
C'est en 1952, avec une rigueur et une ténacité qu'il dotera la petite ville du Mesnil-Saint-Denis (1.856 habitants) d'un patrimoine important. En effet, le château (ancienne demeure de la famille Habert de Montmor) et les neufs hectares de terrain l'entourant étaient à vendre. Après de nombreuses négociations la signature des actes se fit le 16 décembre 1952. La commune devenait ainsi propriétaire pour 10.675.000 d'anciens francs du château et de son domaine qui aujourd'hui fait l'envie de beaucoup.

L'acquisition du château devait relever un incroyable défi :
faire de cette demeure historique, un complexe scolaire ! apportant ainsi de remarquables solutions aux problèmes scolaires du moment et aux problèmes des bâtiments administratifs.

Pourquoi au lieu d'exécuter un plan neuf, n'installerait-on pas les écoles dans une partie du château et dans ses dépendances ? Mais fallait-il encore convaincre l'Inspecteur d'Académie. Celui-ci eu le mérite de comprendre l'importance, même hasardeuse du projet et compris le bénéfice que pourraient retirer les enfants d'un pareil site.
     
 

 
     
On inaugura le 2 juin 1955 la nouvelle mairie du Mesnil-Saint-Denis et après de sérieuses restaurations les élèves y vinrent étudier marquant ainsi l'apogée de la grande aventure scolaire.
     
En 1957, Raymond Berrurier, particulièrement attaché aux problèmes de l'équilibre entre les régions urbaines et les régions rurales, fit adopter à l'unanimité des Conseillers Généraux de Seine-et-Oise, un important rapport sur la défense du département devant le plan d'aménagement de la Région Parisienne.
Il déclarait alors : - "
Je veux défendre à tout moment et en tout lieu les nécessités de cette vie rurale devant les projets et les organismes gouvernementaux ou administratifs comme devant les intérêts urbains"
et ajoutait : - "
J'ai su creuser ma place partout où je pouvais agir, jusque dans les plus hautes instances de l'Etat sans désarmer devant personne, devant aucun intérêt, devant aucun parti...".

   

Raymond Berrurier au cours des Etats-Généraux de Rome, S.S. Paul VI accueille le Secrétaire général de l'A.F.C.C.E.

     
Le 13 août 1957, le Gouvernement tint à lui accorder la suprême récompense pour son dévouement en chargeant Maurice Pic, secrétaire d'Etat à l'Intérieur, de lui remettre la Rosette d'Officier de la Légion d'Honneur.
     
     

Raymond Berrurier était aussi convaincu de la nécessité de procurer à chacun, quelle que soit sa place dans la société, des conditions de vie convenables qui lui permettent de choisir la résidence et de devenir propriétaire de son logement, et à ce titre, il avait crée "Les Castors" dont il présidait l'Association Départementale.

Ce qui fera dire à M. Lévitt, le grand constructeur américain, aujourd'hui solidement implanté au Mesnil : -"
Que serait votre pays, si toutes vos communes avaient la chance d'avoir un homme comme lui à leur tête ?".

Raymond Berrurier à Munïch en 1961

   
     
Une des dernières interventions de Maître Raymond Berrurier fut son allocution qu'il prononça en novembre 1966 au cours du 50e Congrès des Maires de France.

Sur le thème "les communes devant l'humanisation du Plan et de l'Aménagement du Territoire", le maire du Mesnil fit étalage de tous "les problèmes mal posés dans une France vide". Après avoir rappelé le grand pourcentage des communes de France n'ayant aucune vie réelle, il dénonça l'accroissement urbain massif prévu pour l'an 2000.

Il exposa aussi une théorie qui lui était chère : celle des 'Quatre piliers" où les conditions de vie des hommes sont examinées.
Pour vivre heureux déclarait-il : "
les conditions requises doivent s'orienter dans quatre directions : la vie matérielle, l'exercice des activités, la vie civique et la vie intellectuelle et morale".
     
Le 31 mars 1967, le château du Mesnil-Saint-Denis reçut les vingt représentants des communes d'Europe, venus au lendemain de la Conférence européenne des pouvoirs locaux qui s'était tenue à Paris. Sous la présidence de Raymond Berrurier, les hôtes européens débattirent des problèmes des expropriations et des indemnisations posés aux propriétaires fonciers et spécialement aux agriculteurs, notamment en région parisienne. Parmi les membres qui assistèrent à cette scéance, signalons la présence de M. Grosso, maire de Turin, M. Landolt, maire de Zurich, M. O'Mahony, président des communes irlandaises, M. Doubleday, de l'Aménagement du Territoire de Grande-Bretagne, M. Duvert, secrétaire général adjoint des maires de France, M. Malgaci, maire de Konya (Turquie), M. Evers, président des Communes norvégiennes, M. Ravesloot, maire de Delft, M. Flaming, du Land de Rhénanie-Palatinat, M. Busgen, des communes d'Allemagne, M. Brugner, président de l'Institut des Etudes Communales de Lugano.
     
     
Raymond Berrurier s'éteignit brutalement le 8 avril 1967 dans une clinique parisienne. Il étudiait alors dans son lit la maquette de la future et actuelle Maison des Jeunes du Mesnil-Saint-Denis. Jusqu'à la dernière seconde de sa vie, il se dévoua ainsi à la collectivité.
     
Ses obsèques furent célébrées le jeudi 13 avril 1967. Son corps fut exposé à l'Hôtel de Ville dans le Grand-Salon du château, où vinrent se recueillir des milliers de personnes.
     
Plus de trois milles personnes se pressèrent dans l'église pour assister aux obsèques religieuses et à l'absoute donnée par le chanoine Lambert.

De nombreuses personnalités vinrent rendre hommage au défunt : préfets, sénateurs, conseillers généraux, maires, le président du Tribunal d'instance de Versailles, les colonels de la Gendarmerie nationale et de la Protection civile, ainsi que les acteurs Fernand Ledoux et Jean Marais.

De nombreux notaires avaient tenu à manifester leurs respectueux sentiments à l'égard du défunt en assistant aux obsèques en habit, tenue d'apparat de leur profession.

Les funérailles à l'église et les discours furent sonorisés dans toute la commune et furent retransmis à la télévision française.
     
     
© Olivier FAUVEAU 2003    
     
     
 

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