A l'aube du troisième
millénaire, retournons un instant en plein coeur du
romantisme français, |
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griffonne
le papier et que soudain apparaît au commencement d'une
volute, |
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Sophie Gay, par J.B. Isabey |
Delphine
Gay de Girardin, |
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Glissons-nous discrètement derrière son épaule, et écoutons les confidences d'une femme dont Balzac, dira qu'elle avait l'esprit, la beauté et les amours des reines du temps passé. | |||
Versailles, 20 septembre 1842 | |||
[...]
ce tems moitié pluie, moitié soleil convient mieux à
ma santé que la grande chaleur aussi en-ai je profité
pour faire quelques visites dans les environs. [...] |
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Sophie Gay |
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Lettre appartenant aux archives Détroyat |
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Gay
(Sophie Nichault de La Valette, Mme Sigismond) Marie Françoise Sophie Nichault de La Valette, est née le 1er juillet 1776 à Paris. Issue d'une famille ruinée par la Révolution, elle avait épousé en 1791 un riche financier, Gaspard Liottier, de vingt ans son aîné. Pendant le Directoire elle fut une femme à la mode, recevant dans un brillant salon. En 1799, elle rompit avec son mari, conservant la garde de ses trois filles ; peu après elle se remaria avec Jean Sigismond Gay (1768-1822) qui devait devenir sous l'Empire, receveur général au département de la Roër, et qui lui donna trois enfants : Delphine, la future Mme de Girardin ; Bernandine-Isaure et Edmond. Elle adopta également une fille de son mari, Elisa-Louise, future comtesse O'Donnell. Elle fit son début dans les lettres en prenant la défense de la Delphine de Mme de Staël. La même année elle publia Laure d'Estell (Pougens, 1802), roman où elle mettait en scène, et non à son avantage, Mme de Genlis. Tantôt à Paris, tantôt à Aix-la-Chapelle auprès de son mari, elle réunissait autour d'elle une société brillante. Elève de Méhul, elle composa des romances sentimentales qui furent à la mode. Léonie de Montbreuse (Renard, 1913), Anatole (Firmin-Didot, 1815), oeuvres gracieuses et romanesques, les Malheurs d'un amant amoureux (1818-1823), livre où revit la société du Directoire, le Moqueur amoureux (1830), un Mariage sous l'Empire (1832), la Duchesse de Châteauroux (1834), tels furent ses autres romans. Elle a laissé, en outre, des opéras-comiques et des comédies, dont une, le Marquis de Pomenars (1820) obtint du succès. En 1833-1834, elle dirigea les Causeries du Monde. En dépit d'une situation financière assez difficile, sous la Restauration et la Monarchie de Juillet, son salon ne cessa pas d'être fréquenté par les plus grands écrivains et artistes de son temps. Sophie Gay passera les dernières années de sa vie à Versailles, et mourut à Paris à l'âge de soixante seize ans le 5 mars 1852. |
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Sophie Gay, crayon par J.B Isabey |
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Delphine Gay, Madame Emile de Girardin Née à Aix-la-Chapelle le 26 janvier 1804, morte à Paris le 29 juin 1855. Elle connut au sortir de l'adolescence une véritable gloire ; sa beauté, ses dons poétiques lui valurent le surnom de Muse de la patrie. Grâce à sa mère qui recevait beaucoup, elle fit la connaissance de l'élite du début du XIXe siècle. Elle fut l'amie d'enfance de Napoléon III. En 1822, Alfred de Vigny s'éprend d'elle. C'est l'année où elle obtint un prix académique pour un petit poème intitulé : les Soeurs de sainte Camille ; elle publia alors des meilleurs morceaux poétiques : Madeleine, Ourika (1824) ; le Bonheur d'être belle (1825) ; le Sacre de Charles X, qui lui valut une pension ; la Mort de Napoléon, la Mort du général Foy, qui lui attribuèrent les sympathies des libéraux. Ces premiers vers, qu'on trouve réunis dans Essais poétiques (1824) et Nouveaux essais poétiques (Canel, 1825), se font remarquer par une élégance brillante et classique. En 1826-1827, elle fit un voyage en Italie, et fut couronnée au Capitole. Elle composa de nouvelles poésies élégiatiques : le Retour, Palerme, le Dernier jour de Pompéi, et surtout Napoline (1833), qui dénote l'influence de Musset. Le 1er juin 1831, elle épousait Emile de Girardin (1806-1882), journaliste, fondateur de La Presse et député de Bourganeuf (Creuse). Dès lors son salon éclipsa celui de sa mère. En tête de liste des habitués, figuraient Victor Hugo, Alfred de Musset, Théophile Gautier, Frédéric Soulié, la duchesse d'Abrantès, Marceline Desbordes-Valmore, Louis Ganderax, Alphonse de Lamartine, Jules Janin, Jules Sandeau, Franz Liszt, Alexandre Dumas (père), George Sand, Fortunée Hamelin. Elle se montra pour son mari une collaboratrice précieuse, publiant dans la Presse des articles de critique d'une malice vive et spirituelle : telles furent les Lettres parisiennes, qui sous le pseudonyme du vicomte de Launay parurent de 1836 à 1847 en feuilleton. Ses poésies furent désormais inspirées par la politique : l'Epître à la Chambre, la Diatribe contre le général Cavaignac. On lui doit des romans : le Lorgnon (1831), le Marquis de Pontanges (1835), Contes d'une vieille fille à ses neveux (1832), Marguerite (1853), Il ne faut pas jouer avec la douleur (1855), la Croix de Berny (1846), en collaboration avec Méry, J.Sandeau et Théophile Gautier ; et des oeuvres dramatiques : l'Ecole des journalistes (1840), Judith (1843), Cléopâtre (1847), C'est la faute du mari (1851), Lady Tartufe (1853), La joie fait peur (1854), le Chapeau d'un horloger (1855). Amie de Balzac, admirant sincèrement son oeuvre, elle lui consacra en 1836 un petit livre flatteur : la Canne de Monsieur de Balzac. Bien souvent, elle s'entremit entre Emile de Girardin et Honoré de Balzac sans parvenir à éviter la brouille finale. Balzac, en 1842, lui avait dédié Albert Savarus "comme un témoignage d'affectueuse admiration", dédicace biffée par lui sur l'exemplaire Furne de la Bibliothèque Lovenjoul à la suite de sa dispute avec Girardin. Douée de beaucoup d'esprit, sans être dénuée d'une grâce mélancolique, Madame de Girardin, fut traitée en reine par les plus grands écrivains de son temps. |
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Delphine de Girardin et Emile de Girardin |
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© Olivier Fauveau - 2003 | |||